Le développement durable au coeur de la stratégie universitaire : le regard de Lionel Vinour, de l’université de Poitiers
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Le développement durable au coeur de la stratégie universitaire : le regard de Lionel Vinour, de l’université de Poitiers

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    Formations, recherche, innovations technologiques, patrimoine universitaire : à l’image de nombreuses universités, celle de Poitiers est depuis longtemps très investie sur les problématiques relatives au développement durable. Lionel Vinour est directeur logistique et patrimoine à l’Université. Il interviendra d’ailleurs lors du séminaire « Voyage vers les campus du futur » qui aura lieu à l’université de Poitiers le 25 et 26 novembre.
    A l’heure où va s’ouvrir la 21e conférence des Nations Unies sur les changements climatiques, Lionel Vinour fait le point, pour le site de la CPU, sur la façon dont son université répond à cette urgence. Un engagement remarquable, et un modèle à suivre…

    CPU : Quelles sont vos missions et les grandes problématiques auxquelles les bâtiments universitaires de l’université de Poitiers sont confrontés ?

    Lionel Vinour : Les missions ont beaucoup évolué et ce n’est sans doute pas terminé ! Nous sommes passés de la gestion technique des bâtiments au pilotage de la fonction patrimoniale dans toutes ses dimensions. La dévolution du patrimoine, instituée par la loi d’août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités, a été aussi un accélérateur car la pleine propriété du bâti et du foncier a porté des responsabilités plus large en termes de maîtrise d’ouvrage, de valorisation du patrimoine ou encore d’aménagement foncier…
    Le patrimoine poitevin est confronté aux mêmes enjeux que celui de nombreuses universités : améliorer la performance énergétique, assurer la sécurité, mettre en accessibilité, développer la flexibilité et favoriser l’adaptabilité à de nouveaux usages.

    Dans une semaine s’ouvre la Cop 21, quelle doit être la place de l’Université dans le débat? Quelles sont les priorités à aborder ?

    L’Université a une place essentielle. Non seulement elle assure la formation des citoyens de demain et prépare aux nouveaux métiers liés à notre monde en transition mais elle développe aussi les recherches et innovations qui permettront aux générations futures de surmonter les défis que nous leur laissons. Mais elle ne le fait pas seule et la Cop 21 permet de faire connaître, faire savoir et co-construire avec l’ensemble des parties prenantes : individus, collectivités, entreprises, associations.
    Sur le plan patrimonial, les enjeux sont majeurs : rien moins que l’excellence environnementale et la soutenabilité financière. Il s’agit de construire et de rénover différemment en anticipant les nouveaux usages, d’améliorer le cadre de travail, de penser le cadre de vie dans un souci de durabilité et d’attractivité.

    La Cop 21 peut-elle, selon vous, donner un nouvel élan aux universités ? Quelle forme cet élan pourrait-il prendre ?

    La Cop 21 est sans nul doute un catalyseur des initiatives et une opportunité pour à la fois donner de la visibilité mais aussi aller plus vite et plus loin sur les problématiques du développement durable. L’enjeu de la transition énergétique est désormais partagé par le plus grand nombre mais les objectifs fixés par la loi d’août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte sont ambitieux et peuvent paraître difficilement atteignables, notamment au regard des montants financiers à mobiliser.
    Enfin, la Cop 21 doit permettre de mobiliser toutes les parties prenantes pour appuyer la transformation des universités en véritables démonstrateurs : de la recherche en développement durable à la généralisation des éco-campus, en passant par la construction d’une société responsable.

    Comment l’université de Poitiers s’engage-t-elle au quotidien pour agir en faveur du développement durable ? Quelles initiatives avez-vous mis en place récemment ?

    L’Université a adopté une stratégie de développement durable et responsabilité sociétale (DDRS) qui englobe tous les aspects du Plan vert. Elle s’est engagée résolument dans l’expérimentation d’un label DDRS qui a le soutien du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche ainsi que celui du ministère du Développement durable et de l’Energie.
    Plus concrètement, nous avons pris des décisions fortes. 0% de pesticides ; 0% de phytosanitaires ; 100% de produits d’entretien éco-labellisés ; 20% du parc automobile en électrique ; 100% des déchets gérés en filières ; la généralisation des dispositifs économes (bâches de recyclage en eau, détecteurs, chasses d’eau 3/5l, éclairages à leds..), des constructions durables (bâtiment passif ou à énergie positive) et surtout un programme soutenu de rénovation énergétique, sans compter une chaufferie biomasse et un réseau de chaleur basse température sur 50% de notre patrimoine.
    Nous cherchons également à être socialement responsables, en favorisant les circuits courts, en exigeant des heures d’insertion dans les chantiers, en donnant aux critères DDRS un poids de 30% de la valeur de jugement des offres dans 100% de nos marchés immobiliers.

    De quelle manière les laboratoires de recherche de votre université se sont-ils emparés de la thématique ?

    Il y a deux niveaux de réponse. La politique de recherche et les pratiques de recherche.
    Pour le premier point, l’université a mis en place des thèmes partagés de recherche (TPR), programmes transdisciplinaires, visant à apporter une réponse aussi complète que possible aux enjeux du développement durable : « environnement, écologie et biodiversité », « pôle autonomie, sport et santé », « efficacités énergétiques et transport ». Nos laboratoires contribuent aux actions de l’axe « bâtiment durable » du contrat de plan Etat-région (CPER) qui traite aussi bien des matériaux de construction performants, à faible impact environnemental, durables et résilients, que de la qualité des environnements intérieurs et des performances environnementales du bâti.
    Pour le second point, nous travaillons sur l’impact de la conduite des activités de recherche sur l’environnement, particulièrement au niveau des sciences pour l’ingénieur et du secteur de la chimie : contrôle de rejets, qualité de l’air et de l’eau, sobriété énergétique, élimination des déchets.

    Y a-t-il une prise de conscience des étudiants et des personnels sur les problématiques liés au développement durable ?

    Comme dans le reste de la société, la prise de conscience a manifestement progressé. Cela est notamment perceptible par l’augmentation régulière d’année en année des projets tutorés et des initiatives étudiantes. Nous travaillons à favoriser la compréhension des enjeux et l’engagement individuel et collectif.
    Pour les personnels aussi la sensibilisation est plus grande mais nous voulons la renforcer pour démultiplier les relais. Ainsi nous avons élaboré un axe dédié au développement durable dans le plan de formation et nous avons décidé de multiplier les opérations d’information et de sensibilisation : articles sur l’éco-campus, visites de chantier durables, enquêtes sur la mobilité, ateliers de réflexion sur le cadre de vie… et animations autour des économies d’énergie dans le cadre de la semaine du « Tour de France Agir Ensemble » avec l’AVUF, l’ADEME et la CPU dans le cadre de la Cop21.

    Sur le même thème, lire l’interview de Fanny Lamote et de Benoît Blouet « Managers énergie : un métier d’avenir à l’université »

    Photo : bâtiment de l’université de Poitiers dont la façade a été récemment refaite dans une démarche de développement durable

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