Managers énergie : un métier d’avenir à l’université
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Managers énergie : un métier d’avenir à l’université

France Universités : date de publication

    Réduire  les consommations de fluides (électricité, gaz, carburants, eau) et en maîtriser les coûts : telles sont les deux missions de l’économe de flux, appelé encore « manager énergie ». Depuis quelques années, l’université prend conscience que la gestion de l’énergie de ses bâtiments est une question primordiale tant sur le plan du développement durable, que sur le plan économique. Pour répondre à ces enjeux, la CPU, en partenariat avec l’Amue, le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche et la Caisse des dépôts, a organisé une première rencontre d’échanges entre économes de flux, le 6 juillet dernier. 

    Depuis octobre 2014, Fanny Lamote est économe de flux à l’Université Toulouse 3 Paul Sabatier. Benoît Blouet est depuis 2009 responsable de la qualité environnementale des bâtiments et de l’énergie à l’Université Rennes 1. A travers un double regard, ils dressent, pour le site de la CPU et celui de l’Amue, les contours de ce métier au croisement de la technique et de la communication.

    Présentez-nous votre métier

    Fanny Lamote : Mon objectif est d’optimiser les consommations de fluides et d’en minimiser l’impact financier. Mes principales missions sont la mise en place d’une utilisation plus performante des équipements pour que ceux-ci répondent aux besoins fonctionnels et de confort, sans gaspillage, et la sensibilisation des usagers pour leur faire prendre conscience de l’impact que leur consommation peut avoir sur la facture de l’université. L’idée : faire adopter des gestes plus économiques à ceux qui n’en ont pas encore. Il s’agit parfois de choses très simples : éteindre la lumière, éteindre son ordinateur le soir, ou plus complexes sur l’optimisation des process de laboratoires.

    Benoit Blouet : Ma mission a évolué car quand je suis arrivé, en 2009, j’étais seul. Et mon rôle ressemblait à l’époque très exactement à ce qu’a pu décrire Fanny.
    Aujourd’hui, je suis accompagné d’un collègue sur toutes les actions qui nécessitent d’aller sur le terrain. Je peux donc me centrer sur la mise en place de nouveaux objectifs pour rendre la fonction pérenne. Mon rôle est de maintenir la gouvernance en veille sur ces sujets cruciaux à travers la proposition et la réalisation de suivi d’études stratégiques ou techniques.

    Au quotidien, à quelles problématiques êtes-vous confrontés ?

    F.L : Aujourd’hui, il nous faut passer d’une logique de gestion et de maintenance à une logique de performance, basée sur la garantie du résultat. C’est un véritable changement culturel.

    B.B : La notion de conduite du changement est essentielle dans ce métier.
    L’énergie est un sujet transversal et très médiatisé. C’est à la fois une force pour nous, mais c’est aussi une difficulté pour pouvoir, à un moment, faire converger les points de vue et justifier de l’action qui est menée au sein de notre établissement.
    Il nous faut aussi répondre aux objectifs très ambitieux fixés au niveau national : – 40 % de consommation d’énergie d’ici 2020. Pour nous, c’est une échéance très courte. Et les montants d’investissement pour atteindre cet objectif sont colossaux : 100 millions d’euros pour l’université Rennes 1.
    Aujourd’hui, nous avons décidé de partir sur un objectif à court terme de – 10% par an.

    F.L : Les locaux de l’Université Toulouse 3 sont vieillissants. Le parc immobilier date majoritairement des années 60. Aujourd’hui, les opérations Toulouse Campus et le CPER 2015-2020 nous permettent de rénover un certain nombre de bâtiments, mais ça n’est pas suffisant.

    Quelle est la valeur ajoutée d’une telle fonction à l’université ?

    B.B : Pilotage de l’établissement et aide à la décision sont, pour moi, les deux valeurs ajoutées de notre fonction. Le manager énergie a un rôle clé pour aider le directeur du patrimoine et sa gouvernance à développer la stratégie, à identifier des financements, à connaître ses ressources et ses dépenses et à identifier les marges de manœuvre.

    F.L : Ce poste permet d’analyser les données de consommations, et de faire le lien avec les acteurs, chose qui n’était pas forcément faite auparavant.

    Présentez-nous une initiative parlante que vous avez mise en place dans votre établissement

    B.B : En 2011, on a installé dans tous les bâtiments du campus des compteurs pour mesurer la consommation en électricité et en eau. Cela nous a permis d’avoir des relevés d’informations précises et de diffuser des tableaux de bord dans les halls ou les lieux d’accueil de l’université.

    F.L : En fait, les gens ne se rendent pas compte de ce qu’ils consomment. Leur communiquer les chiffres peut provoquer un changement dans leurs habitudes.

    B.B : Oui, et on peut prendre un exemple précis pour illustrer cela. Dans le bâtiment du service Imprimerie de mon université, nous avons installé un compteur. Tous les collaborateurs du service se sont lancé le défi d’éteindre tous les soirs et le week-end l’ensemble des équipements. Grâce à cette action, on a pu constater 20% de consommation en moins. A l’échelle du service, cela représente une économie réalisée de 400 euros par an, ce qui peut paraître négligeable. Mais si cette action était réalisée au niveau de tout le personnel de l’établissement, ce serait une économie de 150 000 euros.

    F.L : Afin d’apporter un complément aux financements insuffisants pour assurer une réelle transition énergétique de l’ensemble de son parc immobilier, l’Université s’est associée à la Caisse des Dépôts et Consignations pour monter le projet Intracting. Ce partenariat permet de dégager, à terme, un fonds à hauteur d’1.95 millions d’euros pour financer des travaux générant des économies d’énergie. Le temps de retour sur investissement de ces travaux doit être inférieur à 10 ans, afin d’alimenter de façon pérenne une ligne budgétaire dédiée. L’Intracting est une nouvelle étape et nous allons nous en saisir.

    Quels conseils donneriez-vous à une personne qui arriverait sur cette fonction ?

    B.B : D’être curieux. Et d’être autonome car les contours exacts de cette mission sont encore à définir. Il faut construire par soi-même sa feuille de route, en accord avec sa direction et sa gouvernance. Il est ainsi important d’être force de propositions.

    F.L : Et il faut être à l’écoute des gens aussi car à l’Université, la notion de co-construction est fondamentale.

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