Interview : École, science et société par Virginie Dupont, vice-présidente de France Universités

Interview : École, science et société par Virginie Dupont, vice-présidente de France Universités

France Universités : date de publication

    L’école est le lieu premier où s’acquiert le goût des sciences. Connaissance du monde dans lequel nous vivons, désir de contribuer à son amélioration, sensibilisation aux défis technologiques, écologiques et sociétaux : les enseignants sont les vecteurs de la transmission des savoirs, et de la culture scientifique et technologique. Leur formation doit donc être polyvalente, excellente et sans cesse actualisée. Et les universités s’y attellent. Le 15 décembre dernier, France Universités organisait, avec l’Académie des sciences, l’Académie des technologies et la Fondation La main à la pâte, le colloque « Science et société : le rôle de l’éducation ».
    Dans cet interview, Virginie Dupont, présidente de l’Université Bretagne Sud et vice-présidente de France Universités, revient sur le rôle clé des enseignants de l’école primaire dans la transmission du savoir. Elle nous explique pourquoi et comment la formation des maîtres, qui est assurée par les universités, doit être renforcée et renouvelée. Pour elle, il est urgent de « réactiver le cercle vertueux dans lequel les bons élèves deviennent de bons étudiants, et eux-mêmes de bons enseignants ».

    Pourquoi la formation des élèves est-elle clé dans le renforcement des liens entre la science et la société ?
    A un âge où la curiosité est très forte, l’école primaire donne aux élèves les clés pour comprendre le monde dans lequel ils vivent, un monde qui évolue sans cesse. La jeunesse est avide de réponse sur des sujets primordiaux comme le climat, l’écologie, l’égalité entre les femmes et les hommes, la lutte contre les discriminations… L’éducation a une place singulière car elle est l’un des principaux vecteurs de diffusion de la culture scientifique et technologique auprès des jeunes citoyens. Et pour remplir ses missions, l’Université entend former au mieux les enseignants dans ces domaines.

    L’école se doit également de donner aux élèves les réflexes pour lutter contre la désinformation, de pousser toujours plus loin la connaissance dans tous les domaines abordés, de promouvoir la relation entre la science, l’art et la culture.

    Elle doit, par ailleurs, mener une action spécifique en direction des jeunes filles qui, en raison des stéréotypes de genre, osent moins se lancer dans une carrière scientifique.

    Quels sont les outils à disposition des universités pour former au mieux les enseignants du premier et second degré ?
    Les liens entre l’Ecole et l’Université doivent encore être renforcés. Il nous faut réactiver le cercle vertueux dans lequel les bons élèves deviennent de bons étudiants, et eux-mêmes de bons enseignants.

    Une formation initiale solide

    C’est au sein des universités que les professeurs, de la maternelle au lycée, sont formés. Accessible à la suite d’un cursus universitaire (Master disciplinaire ou Master MEEF), le concours des enseignants est organisé par l’Université. Et la formation de maîtres se déroule au sein des instituts nationaux supérieurs du professorat et de l’éducation (INSPE), toujours en lien avec l’Université.

    En primaire, les professeurs des écoles enseignent neuf matières différentes. Cette polyvalence impose la nécessité d’un parcours universitaire en 5 ans.

    La formation continue pour renforcer l’enseignement des sciences

    La formation continue est une pièce essentielle de la formation des enseignants car elle permet d’accompagner des professeurs qui, au primaire, peuvent enseigner de la classe de maternelle au CM2 et qui doivent actualiser leurs connaissances.

    De plus, la formation des enseignants doit davantage mettre l’accent sur les sciences et technologies. Rappelons que 80% des professeurs du primaire sont issus d’un cursus en sciences humaines et sociales. Par ailleurs, on observe que les heures qui devraient être consacrées à l’enseignement des sciences et technologies ne sont pas toujours respectées dans le premier degré. Aussi faut-il proposer une formation continue de cet enseignement à tous les enseignants qui le souhaitent et insister sur l’importance de l’enseignement des sciences.

    Conscientes de ces besoins, nombre d’universités ont mis en place des actions de formation des personnels enseignants, du premier comme du second degré.

    Quelques exemples : l’Université de Bretagne Occidentale avec le dispositif Mer & Éducation ; les Mallettes Mérite de l’Université de Nantes ; et à la Maison pour la science de l’Université Rennes 1, une trentaine de formations sont proposées aux professeurs du second degré, avec des ressources pédagogiques en ligne en sciences expérimentales et en mathématiques.

    Quelles formes pourraient prendre la découverte de la parole scientifique pour les élèves ?

    Des actions en lien avec l’Université existent déjà. Par exemple : les maisons pour la science implantées dans les universités de tout le territoire, la fête de la science, ou encore la nuit européenne des chercheur.e.s, qui ont lieu chaque année.

    Depuis 8 ans, France Universités et le CNRS organisent le concours « Ma thèse en 180 secondes » : le public lycéen était d’ailleurs largement représenté dans la salle lors de la dernière finale nationale. 
    Par ailleurs, chaque année, les universités ouvrent leurs portes et accueillent des publics scolaires au cœur de leurs laboratoires et de leurs amphithéâtres.
    Réciproquement, l’action en milieu scolaire constitue un des terrains privilégiés de la médiation scientifique. Citions, par exemple, « Passeport recherche » à l’Université de Nantes, « Thèse qui peut » à l’Université de Toulouse-Jean Jaurès, « Apprentis chercheurs » à l’Université d’Angers, « Ateliers d’AMU » à Aix-Marseille Université, ou encore « Univerlacité » à l’Université de Montpellier.
    Enfin, certains projets ciblent plus particulièrement les quartiers relevant de la politique de la ville, et d’autres encore, les jeunes filles.

    Face à l’ampleur du défi, France Universités est pleinement investie sur la thématique. Elle a d’ailleurs mis en place un groupe de travail, afin de donner au Gouvernement des pistes d’actions concrètes.


    Lire l’article consacré au séminaire du 15 décembre 2022 ;

    Revoir les échanges du séminaire du 15 décembre 2022 ;

    Lire l’interview de Nathalie Dompnier, présidente de l’Université Lyon 2 « Sensibiliser les plus jeunes à la démarche scientifique est un puissant levier pour renforcer le lien Science et Société ».

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