[Résultats d’enquête] Voyager après la COVID-19 : Premiers résultats à l’échelle internationale

France Universités : date de publication

    Résultats d’une étude internationale en 16 langues partagée en ligne par le biais de réseaux professionnels et universitaires spécialisés dans le tourisme. Par Frédéric Thomas, Maître de conférences associé, IREST, Paris1 Panthéon-Sorbonne

    La pandémie associée à la COVID-19 a fortement impacté le secteur du tourisme avec des prévisions d’arrivées de touristes internationaux régulièrement revues à la baisse dans tous les pays pour l’année 2020. Si de nombreux efforts sont menés pour relancer le secteur et assister les entrepreneurs et les opérateurs touristiques, la question de la propension à voyager, bien que centrale, commence seulement à être traitée. La plupart des études se sont effectivement concentrées sur les impacts avant de se tourner, plus récemment, sur la perception du risque voyage (Gallego et Font, 2020). Parmi les facteurs explicatifs de cette tendance, on perçoit le besoin logique et prioritaire de faire un état des lieux avant de réfléchir aux solutions appropriées pour une reprise. Ce constat du passage d’un sur-tourisme dans de nombreuses destinations à l’absence totale de tourisme a notamment mis en lumière le besoin de rendre le tourisme plus « durable ».

    L’article “Voyager après la COVID” présente les résultats d’une étude internationale en 16 langues partagée en ligne par le biais de réseaux professionnels et universitaires spécialisés dans le tourisme. Au total, 1764 individus d’une cinquantaine de nationalités ont répondu à 6 questions sur une échelle de Likert de 1 à 5[1] sur leur propension à voyager et la probabilité de changer de comportement après le COVID. Enfin, il leur était demandé leur perception des différentes régions du monde quant à leur niveau de risque en termes de santé publique et donc la probabilité qu’ils y voyagent.

    Pour de nombreux répondants, il demeure une grande incertitude au regard de leur capacité financière à voyager dans l’année à venir, cela même si pour une grande partie d’entre eux, le désir de ne pas changer de comportement reste majoritaire. Ce constat surprend car ils sont contraints par les décisions des gouvernements (restrictions aux voyages, travel bubbles, etc.) et, paradoxalement, nombreux sont ceux souhaitant une nouvelle forme de tourisme, plus respectueuse des communautés visitées et de la nature. Les réponses sont principalement influencées par l’âge et les zones géographiques des répondants plus que par leur nationalité en tant que telle. Il semble aussi que les répondants des pays du Nord soient plus confiants quant à leur capacité financière pour les années à venir que ceux des économies émergentes. Faut il y voir un excès de confiance dans la capacité des états et des institutions internationales à pondérer les impacts de la crise ? 

    Pourtant, la COVID-19, et plus particulièrement sa gestion par les gouvernements, ont eu des conséquences plus ou moins graves selon les pays avec de fortes différences entre les régions du monde et plus précisément au sein de celles voyant un impact financier limité de la crise sur leurs revenus. Au moment de l’étude, il apparait ainsi une corrélation forte entre le nombre de cas dans un pays et sa perception comme une destination à éviter. Les destinations américaines et Européennes, les plus touchées par la COVID-19, sont par exemple cités par une majorité des répondants comme fortement à risque. Il en est de même pour les destinations de tourisme de masse et les grandes villes sauf pour répondants d’Asie-Pacifique, région moins touchée par la pandémie. La tendance future serait aux grands espaces mais la contradiction de certaines réponses entre elles reflète aussi la possibilité que les émotions du moment aient pu interférer avec l’évaluation. Il apparaît déjà que les réponses aux questionnaires mis en place en période de crise ou d’incertitude souffre effectivement de ce que l’on appelle le biais de désirabilité sociale ou le biais affectif.

    Au final, l’actualité et l’observation des comportements post-déconfinement permettent de conclure que ces derniers sont dépendants des restrictions mais dès lors que ces restrictions sont levées, il n’apparaît pas de changements fondamentaux au regard des problématiques soulevées. La question est donc de savoir si la pandémie a vraiment changé quelque chose dans les comportements des individus ? Si tel n’est pas le cas, les destinations vont-elles simplement reprendre leur course à l’attractivité et aux objectifs quantitatifs ?

     

    Pour aller plus loin

     

    L’auteur tient à remercier Christine Jacquemin du RTA (www.be-rta.com) et les anciens et actuels étudiants de l’IREST, Paris 1 Panthéon-Sorbonne, pour leur aide à la traduction et à la diffusion du questionnaire dans leurs réseaux (Youra Choi, Luis Alenjandro Davila, Haimin Lin et Xi Zhao, Sydney To, Phuong Nhung Cao, Tourkia Maatoug, Afrooz Shafiei, Greta Livia Rapp, Anna Katebelona).

    [1]La note 1 correspondant à « Totalement en désaccord », 3 « indécis » et  5 « complètement d’accord » comme le montrent les graphiques des questions 1 à 7.

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