« Promouvoir les valeurs de la démocratie en Europe » : une interview d’Alain Chouraqui.
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« Promouvoir les valeurs de la démocratie en Europe » : une interview d’Alain Chouraqui.

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    Alors que le bus d’alerte républicaine effectue la tournée des campus universitaires, Alain Chouraqui, Président de la Fondation du Camp des Milles-Mémoire et Education, met en lumière l’enjeu de ce dispositif qui entend « partager les leçons de l’Histoire et promouvoir les valeurs de la démocratie et de la paix en Europe ». Si pour lui, « l’Université n’échappe pas aux stéréotypes et préjugés discriminatoires », celle-ci doit « agir avec ses armes […] en multipliant les actions de sensibilisation ». 

    CPU : Du 29 avril au 21 mai, le Camp des Milles met en place le « Bus d’Alerte Républicaine et Démocratique » (BARD). Quel est l’enjeu de ce dispositif ?

    Alain Chouraqui : Dans le cadre de ses dispositifs pédagogiques fondés sur l’expérience historique, le Camp des Milles a souhaité mettre en place à nouveau, après la forte adhésion rencontrée en 2017, une campagne « Pour la démocratie », appelant à la vigilance face aux extrémismes identitaires, religieux, nationalistes et politiques. Cette campagne se donne pour objectif de partager les leçons de l’Histoire et de promouvoir les valeurs de la démocratie et de la paix en Europe, menacées par la montée des extrêmes. Il s’agit d’inciter les citoyens à participer à la vie démocratique, par le vote en particulier. L’objectif est de diffuser les questionnements et analyses scientifiques  développés sur le site-mémorial à partir de recherches pluridisciplinaires et inter génocidaires : comment les sociétés passent-elles d’un terreau de tensions et de racismes « ordinaires » à l’autoritarisme voire à la barbarie ? Quel rôle moteur jouent les extrémismes et radicalisations identitaires ? Comment la passivité participe aux engrenages menant au pire ? Surtout, comment résister à ces processus ?

    Pourquoi, cette année, le bus a-t-il décidé de s’arrêter devant les établissements d’enseignement supérieur ? 

    Le camp des Milles accueille 120 000 visiteurs par an dont 68 000 jeunes. Les étudiants en particulier sont des acteurs privilégiés de la vigilance face aux dérives extrémistes car celle-ci repose largement sur la compréhension scientifique des mécanismes à l’œuvre.  En outre, l’Université n’échappe pas aux stéréotypes et préjugés discriminatoires, aux racismes et à l’antisémitisme, aux extrémismes et radicalisations. Avec l’appui de la CPU, une quinzaine d’universités seront visitées par notre BARD au cours de son périple de 6000 km. 

    De façon plus large, sur quels leviers les universités peuvent-elles agir pour lutter contre le racisme et l’antisémitisme ?

    L’Université doit agir avec ses armes. Sur le terrain des discriminations, de l’égalité femmes-hommes, du racisme et de l’antisémitisme, elle doit multiplier les actions de sensibilisation (visites et ateliers), les modules de formation dans toutes les filières, les incitations à l’action civique, en prenant appui sur des partenaires extérieurs, comme la fondation du camp des Milles. C’est le cas à Aix-Marseille Université avec par exemple la mise en place d’un bonus « lutte contre les discriminations » animé par la Fondation du Camp des Milles et auquel accèdent de plus en plus d’étudiants de toutes disciplines, de la Licence (L1, L2, L3) au Master (M1). Elle ne doit pas négliger non plus l’animation des campus sur ces sujets par des conférences, expositions, manifestations culturelles. Dans le domaine de la recherche, AMU en partenariat avec le camp des Milles, porte une Chaire UNESCO et anime un réseau international de chercheurs et d’institutions mémorielles sur le thème « Éducation à la citoyenneté, sciences de l’Homme et convergence des mémoires ». Des actions de recherche et de formation avec plusieurs ESPE se développent aussi dans le cadre d’un partenariat du camp des Milles avec le réseau national des ESPE. 

    En 2015, la grande mobilisation de l’école pour les valeurs de la République, lancée par le Gouvernement, instituait, dans sa mesure 11, la désignation d’un référent « racisme et antisémitisme » au sein de chaque établissement. Dans quelle mesure ce réseau est-il une ressource pour vous ? 

    Localement, dans le partenariat très étroit avec AMU, de nombreuses actions de sensibilisation et de formation ont pu être mises en place avec le Camp des Milles grâce à l’action du référent Racisme et Antisémitisme, et en concertation avec le comité de pilotage de lutte contre les discriminations et pour l’égalité femmes-hommes. Un séminaire européen sur les dispositifs éducatifs tirant « les leçons de passés violents pour un avenir de paix », sur la Shoah et les Balkans, est actuellement en cours impliquant des chercheurs et des étudiants. Au niveau national, grâce à ce réseau de référents et à l’engagement de la CPU, des séminaires sur ces sujets ont pu être organisés, en particulier sur les dynamiques de radicalisation ; la semaine contre le racisme et l’antisémitisme a pu être étendue de l’Education nationale au monde universitaire – ce qui doit être poursuivi. Ce réseau peut être aussi un vecteur des analyses sur la montée des intolérances et des risques pour la démocratie en France ou à l’étranger que développe le Camp des Milles, par exemple en partenariat avec l’Université de Yale pour la situation aux USA. 

    La biographie d’Alain Chouraqui

    Le Petit manuel de survie démocratique et le schéma interactif

    L’Indice d’analyse et d’alerte républicaine et démocratique

    Le film présentant le parcours de visite du Site-mémorial

    Le film présentant les dispositifs pédagogiques

    Le film-documentaire « Que ferais-je demain si…?

    Trois étapes du racisme au crime de masse

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