Interview : Jean Chambaz, président de l’UPMC, candidat au conseil d’administration de l’EUA
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Interview : Jean Chambaz, président de l’UPMC, candidat au conseil d’administration de l’EUA

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    Les 16 et 17 avril prochains, l’Association européenne de l’université (EUA) renouvellera ses instances. Si Rolf Tarrach, ancien président de l’université du Luxembourg et seul candidat au poste de président, devrait être élu à la tête de l’EUA, il s’agira aussi d’élire les cinq membres du conseil d’administration (Board). Douze candidats sont actuellement en lice, dont Jean Chambaz, président de l’Université Pierre et Marie Curie.  
    Créé en 2001, l’EUA compte 850 universités issues de 47 pays différents. Basée à Bruxelles, elle entend porter la voix de l’Université auprès des décideurs européens.

    Candidat français proposé pour se présenter au Board, Jean Chambaz s’est fortement impliqué dans le développement des liens entre les différentes universités européennes. Il a notamment contribué à la création du Conseil de la formation doctorale (CDE-EUA), plateforme de réflexion et d’échange de bonnes pratiques sur le doctorat au sein de l’EUA.
    Il revient pour nous sur les motivations de sa candidature au Board de l’EUA et insiste sur la dimension qu’il entend donner à sa mission.

    CPU : Pourquoi avoir choisi de candidater au Board de l’EUA en avril prochain ?

    Jean Chambaz : En quatorze ans d’existence, l’Association européenne de l’université est devenue la voix des universités européennes. Elle a un rôle important de représentation des universités à Bruxelles, auprès de la Commission et du Parlement. La France est un grand pays d’Europe, et il me semble fondamental qu’elle y soit représentée. C’est pour moi un engagement de poursuivre le travail engagé par Eric Froment et Jean-Pierre Finance avant moi.
    Par la richesse et la diversité de ses membres, l’EUA est une fantastique plate-forme d’échange de bonnes pratiques. Cela nous permet de nous tenir informés d’initiatives extrêmement intéressantes prises dans d’autres contextes et qui pourraient utilement être mises en œuvre dans notre pays.

    CPU : Comment l’EUA peut-elle renforcer l’influence des universités au niveau des instances européennes ?

    J. Ch. : Tout d’abord, il est important que les Universités continuent de participer aux travaux de l’EUA.  Aujourd’hui, malgré l’engagement initial de la France – puisque le premier président de l’EUA, Eric Froment, était français –, force est de constater que la participation française est trop modeste. Nous ne sommes pas assez présents dans les débats et les échanges européens. J’appelle donc les universités françaises qui ne l’ont pas encore fait ou qui ont cessé de le faire, à rejoindre l’EUA. Plus les établissements seront nombreux à y prendre part, plus celle-ci sera représentative et influente.

    CPU : Pensez-vous que les universités et les organismes de recherche sont suffisamment impliqués dans le processus de décision européen?

    J. Ch. : A mon sens, il faut toujours plus d’implication. En France, c’est le Clora (Club des Organismes de Recherche Associés) qui pourrait renforcer cette implication. Son rôle est, en effet, de favoriser les actions des acteurs de la recherche publique française auprès des Institutions de l’Union européenne dans les domaines de la recherche, de la technologie, de l’innovation et de la formation.
    La voix des universités peut avoir un réel impact sur les prises de décision au niveau européen.
    Prenons un exemple que j’ai vécu. A partir de 2003, tout un travail a été fait à l’EUA pour repenser le doctorat au niveau européen. Nous avons émis des propositions qui ont nourri la déclaration de Salzbourg. Le cadre du doctorat a été complètement redéfini.
    A la suite de ce projet et à la demande des universités, l’EUA a créé une plate-forme, le conseil pour la formation doctorale, dont j’ai été le premier président. L’objectif : porter la voix des universités sur le doctorat et échanger des bonnes pratiques. A travers cet exemple, on voit bien que sur un sujet  aussi important que le doctorat, l’initiative des universités a permis d’influer sur les décisions européennes.
    Je pense qu’un même type de réflexion doit être engagé dans le cadre du processus post-Bologne, qui a mis en place le système Licence-Master-Doctorat. Les Universités doivent réfléchir ensemble, prendre du recul pour influer sur les décisions européennes. Cela demande un engagement de l’Université dans son ensemble. Et si la France ne prend pas part à ces grands débats, il ne faudra pas venir se plaindre…

    CPU : Quels sont les grands thèmes sur lesquels l’EUA va devoir réfléchir dans les mois qui viennent?

    J. Ch. : J’en vois trois principaux :

    Tout d’abord, expliciter le rôle des universités, plus encore en période de crise notamment, comme un levier fantastique de développement économique, social et culturel de l’Europe. Il s’agit ici de défendre le financement public des universités, le budget H2020 et Erasmus. Nous devons montrer que l’enseignement supérieur et la recherche doivent rester une priorité de l’Europe si celle-ci veut se sortir des difficultés qu’elle connaît actuellement.
    Ensuite, le doctorat doit être défendu et valorisé.
    Enfin, il faut  une intervention dynamique et créative des universités dans le processus post-Bologne.
    La diversité des formations européennes est une vraie richesse. Il ne s’agit donc pas d’avoir un modèle unique, uniforme, mais d’avoir des principes communs qui vont se déployer en fonction du contexte historique, culturel, et académique de chacun des pays.

    CPU : Quels sont les enjeux actuels de la construction de l’espace européen de l’enseignement supérieur instauré par le processus de Bologne ?

    J. Ch. : Il y a une chose qui est vraiment fondamentale dans le processus de Bologne, c’est le fait d’avoir défini des niveaux de connaissances et de compétences pour la Licence, le Master et le Doctorat qui correspondent à des niveaux de qualifications bien précises. A l’université, les blocs de formation sont bien identifiés, ce qui facilite le lien avec le monde du travail. Enfin, pour s’adresser à la diversité des publics propre à l’Université, il est primordial de mettre l’étudiant au cœur du dispositif et de diversifier l’offre de formation.

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