Promotion du doctorat : les tâtonnements du gouvernement
Le doctorat est le plus haut diplôme de l’enseignement supérieur, c’est le standard international qui atteste que son titulaire est un professionnel formé à et par la recherche. Le Président de la République lui-même a fait de la valorisation du doctorat dans la société française un des axes forts de sa politique d’enseignement supérieur et de recherche, déclarant lors de son allocution au Collège de France, le 5 février dernier « Comment accepter dans un grand pays comme le nôtre que le plus haut gradé dans l’enseignement supérieur – c’est-à-dire le docteur – soit aussi peu reconnu sur le marché du travail ? […] l’Etat lui-même doit montrer l’exemple, il ne peut pas dire aux entreprises d’embaucher plus de docteurs et en même temps ne pas avoir des pratiques à la hauteur de cette ambition. »
Sur cette base, les députés ont amélioré la loi relative à l’enseignement supérieur et à la recherche actuellement en discussion au Parlement en adoptant des amendements ouvrant l’accès aux grands corps de fonctionnaires aux docteurs ainsi que l’accès à l’ENA, à l’unanimité des groupes politiques et contre l’avis du Gouvernement.
Or un nouvel amendement gouvernemental déposé au Sénat aurait pour effet, s’il était adopté, d’annuler les avancées approuvées par les députés. La réécriture proposée reviendrait à se contenter de la situation actuelle et dégraderait la valeur du diplôme national en ne tenant compte que du statut contractuel de ces jeunes. Ceci illustre une fois de plus la puissance de la technocratie et des corporatismes sur le pouvoir politique !
Pour sortir la France de la récession, il faut investir dans la recherche, fondamentale et appliquée, dans l’enseignement supérieur, afin de permettre à la moitié d’une classe d’âge d’acquérir un diplôme du supérieur, seul rempart efficace contre le chômage. Mais il est aussi indispensable que la haute fonction publique, à l’image de nos homologues européens, s’enrichisse des qualités de rigueur des démarches scientifiques, et prenne la mesure des enjeux que porte la recherche pour l’avenir de notre Nation. Les docteurs apporteront à la haute administration non seulement une culture de l’innovation, de la gestion de l’incertitude et de l’expertise scientifique, mais aussi une diversité disciplinaire, culturelle, sociale qui lui font encore défaut.
Le Président de la République l’a bien compris – et nous pensions que ces amendements au projet de loi traduisaient cette volonté.
Notre gouvernement ne saurait encourager la reconnaissance du doctorat par les branches professionnelles sans appliquer au secteur public une mesure nécessaire à sa modernisation et à la diversification du recrutement de ses cadres. Nous, présidents d’université, appelons solennellement les sénateurs à confirmer l’initiative des députés et repousser l’amendement gouvernemental, en montrant ainsi qu’ils participent à cette dynamique indispensable pour notre pays.
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