Pour la sortie de crise, miser sur l’apprentissage à l’université
La Conférence des présidents d’université (CPU) réaffirme que la sortie de crise nécessite de miser sur l’apprentissage à l’université. Or, l’apprentissage rencontre aujourd’hui un problème de financement global. S’il faut manifestement revoir le modèle économique du dispositif, cela doit passer par un travail précis sur les coûts de prise en charge, et non par une mesure uniforme de rabot. L’annonce faite le 24 novembre 2020 par le Premier Ministre de reporter au printemps 2021, pour une application en 2022, toute décision relative au niveau de prise en charge du financement des contrats d’apprentissage montre que les inquiétudes exprimées, notamment par la Conférence des présidents d’université, ont été entendues. Un espace est ouvert à une concertation qui doit à la fois permettre le rétablissement de l’équilibre financier de France Compétences et ouvrir de vraies perspectives au développement de l’apprentissage dans le supérieur.
Pour résoudre les difficultés financières que traverse aujourd’hui France Compétences et qu’un rapport de l’IGAS et de l’IGF daté de septembre 2019 a clairement identifiées, la solution n’est pas dans la baisse uniforme des niveaux de prise en charge des formations de nos établissements. Une telle décision nous ramènerait des années en arrière, lorsque l’apprentissage était vu comme une voie de relégation cantonnée aux premiers niveaux de diplôme. Or, grâce à l’université, nous avons montré que l’apprentissage est une voie d’excellence, au bénéfice réciproque des jeunes et des entreprises. Les universités ont fait de l’apprentissage un levier majeur de l’égalité des chances et du développement des territoires. Elles ont assuré la rénovation de la voie professionnelle en ouvrant des perspectives de parcours à celles et ceux qui s’y engagent, la possibilité d’acquérir un diplôme de l’enseignement supérieur au contenu construit en concertation avec les entreprises et en phase avec les qualifications attendues. Elles ont permis, grâce à l’alternance, une insertion rapide et pertinente, notamment via la mutualisation de plateaux techniques de haut niveau.
L’apprentissage, une formation de haut niveau pour toutes et tous
Mal financer l’apprentissage dans l’enseignement supérieur, ce serait fermer l’horizon de celles et de ceux qui s’y engagent en les privant des ressources indispensables pour poursuivre des études les amenant à leur meilleur niveau. Ce serait malmener l’ascenseur social dont on peine à croire que les porteurs de la suggestion débattue ignorent les fragilités. Ce serait aussi condamner à l’errance des jeunes issus des territoires les plus fragiles de la République. En somme, ce serait revenir au temps où l’apprentissage était une voie de relégation cantonnée aux premiers niveaux de diplôme : et pourtant, grâce à l’université, l’apprentissage est devenu une voie d’excellence.
La relocalisation d’industries et l’émergence de nouveaux pôles doit s’appuyer sur une offre de formation de haut niveau, prenant en compte les changements majeurs que connaissent tous les secteurs professionnels, par l’anticipation de l’émergence de nouveaux métiers, et par les innovations qu’apporte la recherche-développement issue des laboratoires universitaires. Les campus des métiers et des qualifications, portés aujourd’hui principalement par des universités, dans les secteurs les plus divers, montrent que c’est possible.
Il importe dès lors de faire la preuve que la société française mise sur sa jeunesse, profondément inquiète pour son avenir malgré une envie indéniable d’apprendre et de se former.
Repenser le système en deux ans
Le système n’est plus tenable en l’état : il convient de s’interroger sur les raisons de ce déséquilibre, que la hausse du nombre de contrats n’explique pas entièrement. La CPU plaidera lors des discussions à venir pour une approche précise et pour une révision sur plusieurs années du modèle de financement, afin d’éviter les ravages d’un coup de rabot uniforme. Il s’agira donc à la fois de permettre au plan de relance de compenser pendant deux ans les difficultés de financement de ce dispositif, et de réfléchir à des solutions différenciées, passant par un réajustement de certains niveaux de prise en charge excessifs.
Les universités ont parfaitement intégré la nécessité de mieux maîtriser les coûts et de faire évoluer le système de prise en charge de l’apprentissage. Elles sont prêtes à se mobiliser rapidement, par exemple au travers d’un appel à manifestation d’intérêt, pour aider au développement de l’apprentissage et éviter une fragilisation définitive du système.