Etudier en métropole : le portrait de Fosta Lalanne, originaire de Saint-Martin
Le 5 septembre dernier, Fosta Lalanne recevait le prix du concours des Trois océans à l’occasion du Campus Outre-Mer pour son projet sur la lutte contre l’habitat indigne en Outre-Mer. Une belle récompense pour cette jeune fille qui a toujours eu à cœur de donner du sens à ses expériences personnelles par le travail et l’engagement. Portrait d’une étudiante courageuse dont les origines ultramarines ont orienté ses choix
C’est une jeune fille souriante, réfléchie et déterminée. A 23 ans, Fosta Lalanne a déjà connu des expériences de vie peu communes. Originaire d’Haïti, elle suit sa scolarité à Saint-Martin avant d’intégrer Sciences Po Paris à 18 ans. Son parcours tend vers la défense d’une cause qui lui tient particulièrement à cœur : la lutte contre l’habitat indigne.
Une jeunesse qui forge des choix
Née en Haïti, Fosta est élevée jusqu’à l’âge de neuf ans par ses grands-parents. Même si elle garde un souvenir ému de ces années, elle décrit des conditions de vie très précaires. « Nous étions huit dans seulement deux pièces ». Cette expérience pose certainement les bases d’une sensibilité toute particulière aux problématiques liées à l’habitat.
A neuf ans, Fosta rejoint Saint-Martin pour vivre avec sa mère. Elle y fera toute sa scolarité.
Le bac ES en poche, Fosta présente le concours de Sciences Po. « Heureusement, un enseignant m’a parlé de l’existence de cette école. Dans mon lycée, on était très peu conseillé, ce qui est, à mon sens, vraiment regrettable ».
Le séisme d’Haïti, un « déclic » pour Fosta
« Alors que je travaillais à la préparation du concours de Sciences Po, par voie parallèle, je n’avais pas encore de thème pour mon dossier de presse » […] « Le séisme qui a eu lieu en Haïti, juste à ce moment-là, en janvier 2010, m’a touchée en plein cœur ». Alors qu’elle se rend sur place pour aider les victimes, notamment ses grands-parents qui y habitent toujours, elle a un véritable déclic. La lutte contre l’habitat indigne devient son cheval de bataille et elle réalise son dossier de presse pour le concours de Sciences Po sur ce thème.
Etudier en métropole : une « véritable ouverture d’esprit »
« Voir autre chose » : telle est l’envie première de Fosta lorsqu’elle quitte l’Outre-Mer. « Même si Saint-Martin me manque beaucoup, venir en métropole a été une très bonne chose pour moi car cela m’a complètement ouvert l’esprit ». Chaque année, près de 25 000 étudiants ultramarins quittent leur territoire pour venir étudier dans l’hexagone. Et la transition n’est pas toujours facile à vivre.
« Je suis arrivée complètement seule et j’ai ressenti une fracture culturelle très forte. Lorsque j’ai découvert Paris, j’ai été émerveillée, mais très intimidée. J’ai rejoint le campus de Sciences Po, à Poitiers, spécialisé dans les problématiques latino-américaines ». Fosta a, en effet, en tête d’aider les populations des Caraïbes, et même de toute l’Amérique latine. Elle rejoint ensuite Paris pour intégrer un Master en Stratégies territoriales et urbaines. Elle effectue des stages en relation avec son engagement : sept mois à la Délégation interministérielle à l’Hébergement et à l’Accès au Logement (DIHAL) et dix mois à l’Agence nouvelle des solidarités actives (Ansa), ainsi que des stages de terrain, et, notamment en Equateur et au Mexique.
Le concours des Trois océans : en bel encouragement
Le 5 septembre dernier, Fosta reçoit le prix des « Trois océans », à l’occasion du premier Campus Outre-Mer, pour son projet sur la lutte contre l’habitat indigne en Outre-Mer. « J’étais très émue de recevoir ce prix car cela récompense tout mon parcours scolaire, personnel et professionnel […]. C’est le couronnement de mes cinq années d’étude ».
Selon elle, le plus important lorsqu’on vit en Outre-Mer et qu’on désire faire ses études en métropole, c’est de croire en ce que l’on veut accomplir. « En Outre-Mer, les gens ont plein de projets, mais ils ne croient pas assez en eux. Il ne faut pas se laisser intimider par certains propos désobligeants qu’on peut entendre à notre égard, en métropole ». Pour se donner toutes les chances de réussir, Fosta insiste sur l’importance de demander de l’aide aux associations car « beaucoup de choses existent, mais le tout est d’être au courant ».
« Cinq ans d’étude en métropole, ce n’est pas facile », mais comme on dit en créole, il faut « chimbé Rèd Pa Moli », c’est-à-dire « tenir bon et ne pas lâcher » !
Pour l’heure, Fosta entend rester à Paris pour « gagner en légitimité sur le plan professionnel », ce qui lui permettra, par la suite, de mettre à profit son intelligence, ses connaissances et ses expériences au service des populations qui en ont, à ses yeux, le plus besoin.
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