Étudiants, chercheurs et enseignants-chercheurs internationaux : une richesse méconnue
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Étudiants, chercheurs et enseignants-chercheurs internationaux : une richesse méconnue

France Universités : date de publication

    Recommandations de France Universités sur la mobilité internationale

    À la suite du ralentissement provoqué par la crise sanitaire, les inscriptions d’étudiants internationaux dans l’enseignement supérieur français connaissent de nouveau une progression notable, particulièrement en 2023-2024 (+4,5 %), ce qui rend l’objectif de 500 000 étudiants internationaux d’ici 2027 désormais envisageable. Cette tendance s’inscrit dans un contexte où la capacité de la France et de l’Europe à assurer seules la formation des futurs acteurs des transitions écologique et numérique apparaît limitée, renforçant ainsi l’importance des échanges académiques à l’échelle mondiale.

    La mobilité internationale ne saurait se réduire à une simple donnée statistique : elle traduit une dynamique culturelle et scientifique de grande portée, à travers laquelle les étudiants, chercheurs et enseignants-chercheurs étrangers deviennent pleinement partie prenante de la vie universitaire et contribuent à l’ouverture des institutions. Pourtant, dans plusieurs pays traditionnellement accueillants, cette mobilité fait aujourd’hui l’objet de remises en cause, alors même qu’elle constitue un levier de vitalité scientifique, mais aussi de dynamisme économique et territorial.

    Reconnaître la place et la valeur de ces étudiants, chercheurs et enseignants-chercheurs suppose donc de consolider les dispositifs d’accueil et de coopération, dans une logique de politique publique affirmée. C’est dans cette perspective que France Universités choisit d’intensifier son engagement et de porter un ensemble de propositions visant à renforcer durablement l’attractivité du système français.


    RECOMMANDATIONS DE FRANCE UNIVERSITÉS EN MATIÈRE DE MOBILITÉ INTERNATIONALE ACADÉMIQUE ET SCIENTIFIQUE :

    1.
    Établir une claire distinction entre mobilité académique et scientifique d’une part, et flux migratoires généraux d’autre part, tant dans les discours publics que dans les dispositifs réglementaires, pour soutenir les apports quantifiables et immatériels des étudiants, chercheurs et enseignants-chercheurs internationaux.

    2.
    Maximiser l’impact des diplômés internationaux dans la stratégie d’influence de notre pays reconnaissant les universités comme des partenaires clés de la diplomatie française, et les associer systématiquement aux rencontres diplomatiques liées au monde académique et scientifique.

    3.
    Lever deux freins majeurs à la mobilité internationale, d’une part en élaborant un cadre national structurant pour l’enseignement du français langue étrangère (FLE), ainsi qu’une stratégie de soutien au développement de formations en langues étrangères, d’autre part en favorisant une stratégie globale de logements dédiés.

    4.
    Mieux coordonner la stratégie internationale des universités entre les différents services (relations internationales, ressources humaines, recherche, scolarité, vie étudiante, communication…) et structurer un dispositif national de collecte et de traitement des données en déployant un système harmonisé d’identification et de suivi des étudiants internationaux.

    5.
    Renforcer les dispositifs dédiés à l’accueil des chercheurs et enseignants-chercheurs internationaux : soutenir l’ouverture scientifique de la France et consolider le rayonnement international de sa recherche par une campagne de communication nationale sur ses forces scientifiques.

    6.
    Reconnaître et valoriser l’impact économique significatif des étudiants internationaux en France, en menant des campagnes de sensibilisation auprès des acteurs économiques nationaux et locaux, et du grand public.

    7.
    Réviser, à l’instar des principaux pays d’accueil dans le monde, les conditions de séjour post-diplôme (démarches administratives, durée du visa de travail, coordination des parties prenantes) pour faciliter l’insertion professionnelle des étudiants internationaux, notamment dans les secteurs en tension.

    8.
    Repenser le dispositif interministériel de soutien à l’attractivité internationale afin d’améliorer la coordination de l’accueil des étudiants entre collectivités, universités et État.

    9.
    Intégrer un volet international dans le Contrat d’Objectifs, de Moyens et de Performance de chaque université afin de favoriser la structuration d’une gouvernance dédiée, de repenser les stratégies de conventionnement avec des entités stratégiques et de mieux cibler les publics accueillis.

    10.
    Compléter les feuilles de route bilatérales issues des comités mixtes pour la science et la technologie (Comixtes) d’un partenariat de talents, à l’image de ceux développés par la Commission européenne, et d’un volet de mobilité de niveau master ou doctorat.


    FAIRE RECONNAÎTRE L’INTERNATIONALISATION COMME UN LEVIER STRATÉGIQUE DE TRANSFORMATION

    Rappeler que l’interculturalité est une richesse pour la société et les individus

    Les universités françaises considèrent l’accueil des étudiants, chercheurs et enseignants-chercheurs internationaux comme essentiel pour renforcer la qualité et la vitalité de l’enseignement supérieur, de de la recherche et de l’innovation. Cette ouverture à l’international génère un environnement d’apprentissage plus riche, ouvert sur le monde et particulièrement formateur pour les futurs citoyens et professionnels. Il est clairement établi que la diversité culturelle encourage l’interdisciplinarité et développe des compétences clés comme l’adaptabilité et la communication interculturelle, sans oublier qu’elle contribue fortement à la nécessaire évolution des pratiques académiques. La mobilité internationale est aussi un moteur d’inclusion, de progrès social et d’innovation, participant à la construction d’une société plus ouverte et plus solidaire. Dans le même temps, les valeurs fondamentales de l’Université française – liberté, esprit critique, rigueur intellectuelle –, qui sont aussi les fondements des sociétés démocratiques, se transmettent et se renforcent, participant à l’essaimage du modèle français. Face à l’évidence de ces bénéfices, les universités appellent à un soutien accru des pouvoirs publics pour reconnaître une spécificité de la mobilité éducative et mieux la faire connaître au grand public.

    En 2023-2024, les universités françaises ont accueilli 271 000 étudiants de nationalité étrangère, soit 64 % des inscrits internationaux dans l’enseignement supérieur en France. (Source : Campus France)

    Reconnaître les diplômés internationaux comme vecteurs de diplomatie française et francophone

    Dans un contexte de recomposition géopolitique, les diplômés internationaux formés en France représentent un levier stratégique de diplomatie d’influence. Leur connaissance de la langue, des valeurs et du système français en fait des ambassadeurs naturels de la France à l’étranger. Chaque année, des milliers d’étudiants issus de divers continents acquièrent en France des compétences, mais aussi une culture et une expérience interculturelle précieuses. De retour dans leur pays, beaucoup occupent des postes clés dans l’administration, l’économie, la recherche ou l’enseignement, et agissent comme intermédiaires entre leur pays et la France. Ils facilitent les échanges culturels, scientifiques et économiques, notamment grâce à leur maîtrise du français et à leur réseau professionnel. Ces diplômés sont également des acteurs majeurs du développement et de la coopération internationale. Pour tirer pleinement parti de ce potentiel, les universités françaises renforcent les réseaux d’alumni – elles saluent en ce sens l’initiative de la Journée mondiale des alumni internationaux (« Alumni Day ») –, afin de pérenniser les liens et de valoriser ces profils influents dans la diplomatie économique et culturelle.

    258 000 anciens étudiants internationaux du réseau France Alumni sortent des universités françaises, soit 68 % de son effectif
    76 % des alumni utilisent la langue française au quotidien
    88 % considèrent que la maîtrise de cette langue a été un atout dans leur vie professionnelle (Source : Campus France)

    CHANGER D’ÉCHELLE ET DE MÉTHODE EN MATIÈRE D’ACCUEIL ET D’ACCOMPAGNEMENT

    Améliorer l’accueil et l’accompagnement au quotidien

    Les séjours d’étude et de recherche sont souvent perçus par les étudiants internationaux en France comme complexes en raison des démarches administratives, des difficultés de logement et du manque d’informations adaptées. Si certaines contraintes dépendent d’acteurs extérieurs, les universités se proposent, pour ce qui les concerne, d’améliorer leur propre organisation. La réussite des étudiants étrangers dépend largement de leur maîtrise du français, langue principale d’enseignement, ce qui représente parfois un obstacle à leur réussite. L’offre de formations en langues étrangères progresse lentement, notamment en anglais, et reste limitée par de fortes contraintes structurelles et culturelles. Par ailleurs, l’enseignement du français langue étrangère (FLE) manque de cadre national clair, est souvent marginalisé dans les cursus et souffre de financements précaires, ce qui entraîne de fortes disparités entre établissements. Les universités s’efforcent néanmoins de mettre sur pied des dispositifs pour sensibiliser l’ensemble de leurs équipes à l’importance d’un accueil de qualité des étudiants internationaux. Enfin, la question du logement reste un frein majeur, avec des coûts élevés qui fragilisent les études : les universités souhaitent donc renforcer la coopération avec tous les acteurs concernés pour construire un accueil plus efficace, notamment en développant davantage de logements dédiés aux étudiants internationaux.

    Le CROUS réserve 25 % de son parc de logements pour les étudiants internationaux (Source : CROUS)

    Agir pour renforcer les conditions de pilotage et de conventionnement

    L’attractivité internationale des universités françaises dépend autant de leur réputation académique que d’une gouvernance coordonnée de la mobilité étudiante et de recherche. Les universités souhaitent mieux intégrer cette mission d’accueil dans une politique globale, avec des objectifs clairs et des moyens adaptés, placés, par exemple, au cœur du Contrat d’Objectifs, de Moyens et de Performance les liant à leur tutelle. Aujourd’hui, l’accueil des étudiants, chercheurs et enseignants-chercheurs internationaux est souvent dispersé entre plusieurs services, ce qui nuit à leur accompagnement. Nombre de conventions bilatérales, y compris interétatiques, demeurent peu exploitées et déconnectées des capacités d’accueil réelles. Une réflexion de fond pourrait être portée sur la manière de mieux utiliser l’outil de conventionnement, notamment avec les pays les plus pourvoyeurs d’étudiants mobiles, tels que ceux du Maghreb, de l’Afrique sub-saharienne ou la Chine. En ce sens, une meilleure coordination entre les ministères en charge de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, et de l’Europe et des Affaires étrangères est essentielle. Mieux conventionner permettra de rééquilibrer ouverture à la diversité des profils et mobilité ciblée.

    En 2024, le budget du programme Erasmus + dévolu à la mobilité internationale (hors UE) s’élevait à 292 M€, dont 25 M€ pour la France, derrière l’Allemagne et devant l’Italie (Source : Agence Erasmus +)

    RENDRE PLUS VISIBLE L’APPORT DES ÉTUDIANTS, CHERCHEURS ET ENSEIGNANTS-CHERCHEURS INTERNATIONAUX

    Valoriser l’enrichissement du potentiel scientifique français par son ouverture à l’international

    L’ouverture internationale est également un pilier fondamental de la qualité et du dynamisme de la recherche en France. L’accueil de doctorants, de post-doctorants et d’enseignants-chercheurs étrangers enrichit les approches scientifiques, stimule l’innovation et renforce l’impact des travaux de recherche. La forte présence d’internationaux au niveau doctoral (37 %) illustre l’importance des collaborations transnationales, qui facilitent l’accès à des ressources partagées et favorisent le rayonnement mondial des universités françaises. De même, les enseignants-chercheurs étrangers jouent un rôle stratégique en consolidant les réseaux de recherche. Toutefois, malgré une progression dans les recrutements (16,3 % d’entre eux en 2023), leur présence demeure limitée (7 % des effectifs en 2020). Les universités appellent donc à un soutien renforcé des pouvoirs publics, des acteurs économiques et de la société civile pour valoriser une politique scientifique d’ouverture à l’international à travers des dispositifs dédiés et une campagne de communication active permettant de dissocier la mobilité scientifique des politiques migratoires générales. En ce sens, les universités saluent l’initiative « Choose France for Science » et plusieurs s’y engagent activement, avec l’objectif de maintenir la France parmi les pays de référence en matière de recherche et d’innovation.

    37 % des doctorants en France sont internationaux
    Le taux de co-publications avec au moins une institution à l’étranger est de 63 %
    7 % des enseignants‑chercheurs titulaires, en France, étaient étrangers en 2020
    16,3 % des enseignants-chercheurs recrutés étaient de nationalité étrangère en 2023 (Source : MESR)

    Rappeler que les étudiants internationaux contribuent directement à l’économie nationale et locale

    Les étudiants internationaux, plus de 430 000 en France aujourd’hui, génèrent un apport économique direct considérable, souvent sous-estimé dans les débats publics. Leurs dépenses (logement, alimentation, transport, frais universitaires, culture…) rapportent chaque année plus de 5 milliards d’euros selon l’enquête menée par Campus France (2022). Plusieurs études d’impact menées par les universités pointent cette plus-value constante. Malgré ces chiffres, les étudiants internationaux sont encore perçus à travers une vision réductrice, voire fausse, occultant leur rôle actif dans la société. Il est donc crucial de valoriser leur contribution afin d’appuyer les politiques d’accueil et de sensibiliser les acteurs économiques nationaux et locaux à leur importance stratégique. Reconnaître cet apport revient à considérer l’enseignement supérieur non seulement comme un service public, mais aussi comme un moteur économique majeur au service du développement territorial et national.

    Un étudiant international dépense en moyenne 11 000 à 13 000 € par an en France (logement, alimentation, transport, santé, loisirs…). Cela représente plus de 5 milliards d’euros injectés annuellement dans l’économie française (Source : Campus France)

    CO-CONSTRUIRE LE POTENTIEL INTERNATIONAL DES UNIVERSITÉS AVEC LES POUVOIRS PUBLICS ET LES TUTELLES

    Améliorer l’intégration des diplômés internationaux pour répondre aux besoins du marché du travail

    Les universités françaises forment des diplômés dotés de compétences relationnelles et comportementales solides, tout en répondant aux besoins en compétences techniques dans des secteurs économiques en tension, comme le numérique, la santé ou encore la transition énergétique. Ancrées territorialement, les universités collaborent déjà avec les acteurs économiques pour adapter leur offre de formation aux besoins régionaux, sachant que les étudiants internationaux diplômés représentent un vivier précieux, puisque près d’un alumni sur deux (48 %) a trouvé son premier emploi en France. Or, en dépit de la demande et de leur potentiel, beaucoup rencontrent des obstacles administratifs à cette insertion professionnelle. C’est pourquoi certaines mesures, telles que la simplification des procédures de séjour et des dispositifs de transition vers l’emploi, s’inspirant des pays les plus attractifs mondialement, s’avèrent nécessaires. Une meilleure coordination entre universités, pouvoirs publics et entreprises permettrait par ailleurs de renforcer l’efficacité des actions d’accompagnement vers l’emploi.

    En 2023-2024, le déficit de professionnels dans le domaine de la cybersécurité était estimé à 290 000 en Europe, dont 60 000 pour la France (Source : Commission européenne)

    Faire converger les politiques européennes, nationales et locales

    L’accueil des étudiants internationaux nécessite une coordination efficace entre les politiques locales, nationales et européennes pour fluidifier leurs parcours et valoriser leur présence sur le territoire. Les collectivités locales jouent un rôle clé dans l’amélioration concrète des conditions d’accueil, notamment pour le logement, mais leur implication varie fortement selon les territoires. Au niveau national, les politiques migratoires parfois rigides et une certaine complexité administrative freinent l’attractivité, tandis que l’absence d’outils partagés limite le suivi et l’anticipation des besoins. L’Union européenne, pour sa part, contribue à harmoniser les politiques et à simplifier les procédures, avec des programmes comme Erasmus+, notamment, qui favorisent des coopérations durables. Une meilleure coordination entre collectivités, universités et État permettrait d’améliorer le fonctionnement et la lisibilité des dispositifs. La création d’un cadre interministériel dédié apparaît indispensable. Sur cette base, France Universités souhaite co-construire avec les tutelles un instrument permettant aux universités de diagnostiquer leur potentiel international, d’identifier des zones géographiques et des domaines stratégiques et de structurer une stratégie d’accueil fondée sur des objectifs précis et mesurables. Enfin, cette réflexion doit également nourrir une politique de mobilité sortante, afin de garantir un échange équilibré et durable avec les pays partenaires.

    92 % des établissements d’enseignement supérieur membres d’une alliance universitaire européenne considèrent que leur participation doit permettre de « renforcer l’attractivité de l’université et son rayonnement international ». (Source : EUA)

    SYNTHÈSE

    Les universités françaises plaident ainsi pour un cadre interministériel réellement dédié à la mobilité internationale, allant au-delà du seul prisme migratoire. Si des initiatives locales existent, il manque une stratégie nationale coordonnée reconnaissant pleinement leur rôle dans la diplomatie et l’attractivité de notre pays.

    Cette stratégie devrait articuler les besoins d’accueil avec les priorités géopolitiques, économiques et scientifiques ; trouver un équilibre entre publics ciblés pour des filières stratégiques et ouverture inclusive ; et reposer sur des objectifs politiques clairs et une meilleure coordination des politiques publiques.

    Des instruments pourraient être mobilisés : intégrer la mobilité internationale dans les COMP, et enrichir les Comixtes avec des partenariats de talents.

    Enfin, la visibilité internationale des universités doit être renforcée, notamment via le rôle des ambassades, des services de coopération et des visites d’État, encore sous-exploités.

     

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