Entrepreneuriat étudiant : pour Jean-Pierre Boissin, « le dispositif est transposable au niveau européen »

Entrepreneuriat étudiant : pour Jean-Pierre Boissin, « le dispositif est transposable au niveau européen »

France Universités : date de publication

    Présent au colloque annuel de la CPU « l’Europe des universités » qui s’est déroulé les 15 et 16 mars dernier à l’université de Bourgogne, Jean-Pierre Boissin, missionné auprès de la ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, pour développer l’entrepreneuriat étudiant dans le cadre du plan PEPITE, intervenait lors de l’atelier « Entrepreneuriat étudiant : quelle place pour les universités françaises sur la scène européenne ? ». Pour le site de la CPU, il revient sur les spécificités françaises du soutien à l’entrepreneuriat étudiant et dresse des pistes pour harmoniser les politiques européennes en la matière.

    Photo : Jean-Pierre Boissin lors du colloque annuel de la CPU

    CPU : Quels sont les dispositifs récents mis en œuvre par la France pour soutenir l’entrepreneuriat étudiant ? Quel a été leur impact ?

    Jean-Pierre Boissin : On constate depuis quelques années une montée en puissance des initiatives françaises pour soutenir l’entrepreneuriat étudiant. Depuis 2014, quatre mesures majeures ont été mises en œuvre :
    – Le développement de modules en entrepreneuriat et en innovation dans les plaquettes pédagogiques suivis par près de 120 000 étudiants dans l’enseignement supérieur ;
    – La création du statut national étudiant-entrepreneur pour les étudiants en cours d’étude et pour les jeunes diplômés. Ce statut est d’abord conçu comme un service à l’étudiant. Dans sa formation pour l’insertion professionnelle, celui-ci est accompagné dans son parcours par deux tuteurs (un enseignant et un praticien). On compte aujourd’hui 3500 étudiants-entrepreneurs et 6000 étudiants impactés, le statut pouvant être renouvelé. 8000 statuts nationaux étudiant-entrepreneur (SNEE) ont été attribués en 4 ans. Et plus de 500 sociétés ont été créées par ces étudiants en 2016/2017.
    – La création d’un Prix PEPITE pour les projets innovants : chaque année, plus de 600 dossiers sont déposés avec 150 lauréats régionaux et 53 lauréats nationaux ;
    – La création de 30 Pôles Etudiants Pour l’innovation, le Développement et l’Entrepreneuriat qui apportent aussi leur soutien aux établissements dans la mise en place de modules et offrent un moyen d’interactions avec les acteurs des écosystèmes territoriaux. Quatre ans après leur création, ces pôles existent toujours. Mais leur pérennité doit être renforcée notamment avec la sortie d’établissements de certaines COMUE. Aujourd’hui, c’est PEPITE France qui fédère ces pôles en permettant l’échange de bonnes pratiques et en continuant à nourrir le dispositif.

    En parallèle de l’activité de chaque pôle, certaines actions sont menées au niveau national : pensons notamment à l’expérimentation d’un certificat de compétences entrepreneuriales pour les étudiants-entrepreneurs appelée « PEPITE Skills », le renforcement de l’accompagnement de l’étudiant-entrepreneur avec le programme d’accélération « PEPITE Starter » , la mise en réseau avec les entreprises PEPITE Challenge.
    En novembre dernier, la Caisse des dépôts a annoncé un prêt d’honneur pour les jeunes en amont et en aval de la création d’entreprise.

    L’activité de PEPITE France est dense : nous organisons le 23 mai prochain une journée de restitution des bonnes pratiques des PEPITE, au cours de laquelle sera lancée la création d’une association des étudiants-entrepreneurs. Et le 26 mai, nous serons présents au salon Viva Tech qui aura lieu à la porte de Versailles, à Paris et assisterons à la cérémonie des 10 plus belles histoires issues de créations d’entreprise des PEPITE.

    Quelles sont les principales différences entre les politiques d’enseignement supérieur et de recherche européens en matière d’entrepreneuriat étudiant ?

    Comme en France, de nombreux établissements européens ont pris des initiatives en matière d’entrepreneuriat et d’innovation notamment en Europe du Nord. La Finlande a souvent été précurseur. Le développement de programmes d’accompagnement et d’incubation connaît de belles réussites dans les pays d’Europe de l’Est.
    Fin 2016, le dispositif PEPITE a été présenté au Directeur Général Education et Culture de la Commission Européenne. Celui-ci s’est montré fortement intéressé par la création des Pôles dans les écosystèmes, par la mise en place de modules avec crédits ECTS et par le statut national étudiant-entrepreneur. Mais pour l’heure, je ne connais pas d’équivalent au programme PEPITE réalisé à l’échelle nationale : celui-ci reste un dispositif unique notamment avec le Statut National Etudiant-Entrepreneur.

    Quels seraient les leviers aujourd’hui pour harmoniser les politiques universitaires en matière d’entrepreneuriat étudiant au niveau européen ? Le dispositif « PEPITE » est-il transposable, et à quelles conditions ?

    Oui, le dispositif est transposable. Nous l’avons fait avec la Belgique, en particulier la Wallonie, ainsi qu’au Maroc, en Tunisie et au Liban, en lien avec l’Agence universitaire de la Francophonie. Par ailleurs, des PEPITE existent au sein de programmes et d’échanges transfrontaliers, notamment à Lille, Strasbourg et Nancy.
    Mais aujourd’hui, nous devons donner un coup d’accélérateur en Europe, et en Amérique du Nord aussi. Lors des échanges sur l’entrepreneuriat étudiant, différentes pistes ont été évoquées :
    – Une intégration dans des dispositifs existants comme l’Université Entrepreneuriale dans laquelle l’étudiant-entrepreneur est une des briques pour une meilleure intégration dans les écosystèmes territoriaux ;
    – Un renforcement de notre présence dans le dispositif Erasmus Jeune Entrepreneur, trop peu mis en œuvre en France ;
    – Une montée en puissance de la France pour influencer le prochain programme cadre. Le dispositif PEPITE pourrait par exemple être proposé à l’échelle européenne ;
    – La certification de compétences entrepreneuriales que nous mettons en œuvre et qui est un excellent support au complément de diplôme attendu par l’Europe ;
    – L’ouverture d’espaces de coworking à l’échelle européenne qui permettrait une accélération de la mobilité des jeunes entrepreneurs et des animateurs de l’accompagnement.

    En tout état de cause, il reste du travail en France pour avoir une offre minimum accessible à tous les étudiants. Pourquoi ne pas ouvrir davantage d’unités d’enseignement Entrepreneuriat transversales, pluridisciplinaires, sur deux ou trois jours, ou ouvrir sur chaque site des espaces de coworking avec les ressources humaines nécessaires à l’accompagnement des étudiants-entrepreneurs ? De nombreuses pistes restent à étudier…

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