[Éclairage] Pour lutter contre le cancer du cerveau : détecter les cellules souches pour les neutraliser
Projet transdisciplinaire visant à développer une technologie permettant de détecter puis neutraliser les cellules souches cancéreuses à l’aide d’ondes électromagnétiques, Sumcastec est un projet de technologie innovante pour lutter contre le cancer qui a pour origine l’association de 2 laboratoires de l’Université de Limoges EA3842 CAPTuR et XLIM. Éclairage par Fabrice Lalloué, enseignant-chercheur à l’Université de Limoges.
Le glioblastome (GBM) est une tumeur cérébrale très agressive et de très mauvais pronostic qui infiltre une partie du cerveau. Malgré un protocole thérapeutique basé sur la chirurgie, suivie d’une combinaison de radiothérapie et chimiothérapie assez lourde, le pronostic évolutif de ce cancer reste très sombre avec une survie des patients extrêmement limitée. En cause, des récidives qui surviennent 8 à 15 mois après la chirurgie et qui sont en partie liées à la présence de cellules souches cancéreuses (CSCs) extrêmement agressives et résistantes aux traitements. Ces cellules présentes dans la tumeur elle-même, sont également disséminées à proximité de cette dernière dans le parenchyme, l’ensemble des tissus cérébral, en raison du caractère infiltrant du glioblastome. N’étant pas retirées au moment de la résection chirurgicale, elles ont la capacité de régénérer la masse tumorale et permettent ainsi d’expliquer les récidives. L’enjeu actuellement est d’être capable de détecter les CSCs dans le tissu tumoral et de développer de nouvelles approches thérapeutiques permettant de les éradiquer.
Détecter les cellules souches cancéreuses
Pour détecter ces cellules et chercher des moyens de les neutraliser, les laboratoires CAPTuR et XLIM de l’Université de Limoges se sont associés depuis de nombreuses années et ont obtenu en 2017 un projet européen H2020 pluridisciplinaire : le projet SUMCASTEC. Ce projet de 4 M d’euros impliquant 5 autres partenaires européens (2 Italie, 1 Allemagne, 2 RU dont une entreprise CREO Medical) associe des biologistes, des cliniciens, des biophysiciens, des ingénieurs électroniciens et des technologues.
Le projet SUMCASTEC a pour objectif de mettre au point une technologie permettant de détecter les cellules souches cancéreuses qui restent très difficiles à identifier avec des approches conventionnelles en raison de leur nombre et de l’absence de marqueurs spécifiques de ce type de cellules. Ceci permet d’expliquer pourquoi, actuellement, ces cellules ne sont pas utilisées pour le diagnostic ou le pronostic clinique. Elles nécessitent de mettre en œuvre des protocoles de caractérisation coûteux, longs et difficilement compatibles avec une utilisation en clinique. Ces cellules sont également difficiles à traiter car elles résistent aux protocoles de radiothérapie ou de chimiothérapie conventionnels. Les 2 équipes de l’Université de Limoges ont donc conçu un laboratoire sur puce, capable de détecter en quelques minutes grâce à des ondes électromagnétiques la présence de ces cellules dans un échantillon. Les perspectives actuelles de développement de ce dispositif ont pour objectif de mettre au point une technologie qui permettrait de trier (sur le principe du cytomètre) les CSCs des autres cellules tumorales à partir de leur signature physique spécifique en appliquant des champs électriques, sans avoir recours à un quelconque marquage.
Il restait à tenter de neutraliser ces cellules dans le cadre du projet SUMCASTEC. Les 2 équipes et leurs collègues Italiens et Anglais du consortium se sont efforcés de trouver des moyens pour pousser ces cellules souches cancéreuses à changer d’état, et à devenir des cellules moins agressives, plus sensibles aux thérapies conventionnelles telles que la radiothérapie ou la chimiothérapie. Nous avons pour cela étudié l’impact de très brèves impulsions d’ondes électromagnétiques sur les CSCs et leur capacité à les transformer en les faisant sortir de cet état souche.
Le projet se poursuit au-delà de SUMCASTEC et nécessite des développements ultérieurs. Il a été valorisé et quatre brevets portés par différents partenaires du projet (L’université de Limoges en porte un en particulier) ont pu être déposés.
Les premiers résultats sont très prometteurs et pourraient permettre l’émergence prochainement d’une nouvelle génération de dispositifs électrochirurgicaux capables de neutraliser les CSCs dans les tissus.
Ces travaux ont été récompensés puisque les équipes de physiciens (XLIM) et de biologistes (CAPTuR) de l’Université de Limoges, en tant que porteuse du projet SUMCASTEC, ont reçu en décembre dernier l’un des 12 trophées des étoiles décerné par le Ministère de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l’innovation, dans la catégorie « Innovation ».
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