Discours

Assises des mathématiques : intervention de Manuel Tunon de Lara

France Universités : date de publication

    France universités est particulièrement heureuse de la tenue de ces Assises, car les mathématiques occupent une place particulière parmi nos champs disciplinaires. Tantôt décriées parce que tenues pour responsables d’orientations par défaut par celles ou ceux ne les maîtrisant pas, tantôt tenues pour le vecteur le plus pertinent de recrutement de scientifiques de haut niveau se destinant ou destinés à la recherche, elles renvoient à des problématiques importantes.

    Les réformes successives du lycée portent les stigmates de ces contradictions. Soit il s’agit de faire en sorte de diluer la place des mathématiques pour ne pas en faire un facteur discriminant, soit le sujet est de renforcer l’option de spécialité pour en faire un critère de la poursuite d’études dans l’enseignement supérieur, même là où l’humain est un facteur central. L’erreur la plus importante commise il y a quelques années fut peut-être de supprimer en 1ère et terminale l’option mathématiques ouverte aux élèves des sections littéraires dont le contact avec un minimum de culture scientifique s’est trouvé rompu, contribuant pour le coup à un cloisonnement regrettable des spécialités. Nous saluons ici, Monsieur le Ministre, les mesures que vous venez d’annoncer et qui s’appuient sur une stratégie veillant à développer leur enseignement à tous les niveaux de la scolarité.

    Car le paradoxe réside dans le constat que la France affiche ces carences dans la formation, ne sait pas inspirer le talent des filles dans les domaines qui manquent par ailleurs de scientifiques, alors que l’école française de mathématiques bénéficie d’une reconnaissance internationale avérée, ce dont atteste notamment le nombre de médailles Fields attribuées à des  mathématiciens français (13) ou, encore, le nombre important de chercheurs français recrutés durablement dans des laboratoires étrangers. L’enjeu n’est donc pas d’une réédition de la querelle des anciens et des modernes, mais dans un enseignement de qualité des mathématiques dès l’école et la prise de conscience partagée que derrière les mathématiques se jouent des enjeux sociétaux majeurs.

    À l’heure où le président de la République attend des ministres en charge de l’Éducation nationale, d’une part, et de l’Enseignement supérieur, d’autre part, la refondation de la formation initiale des professeurs du 1er degré, il faut entendre celles et ceux qui s’alarment des performances à tout le moins contrastées des élèves français dans les tests internationaux « Pisa » comme du niveau insuffisant en sciences des candidates et des candidats aux concours de recrutement des professeurs des écoles.

    Pour France Universités, les propositions sur le sujet sont claires et nous sommes prêts à les préciser autant que nécessaire. L’exigence d’un enseignement des mathématiques de qualité dès l’école passe par la mise en place, dès la licence, d’un parcours spécifique pour ceux qui se destinent au professorat des écoles, articulé autour de deux pôles : l’un centré sur le français et les humanités, l’autre sur les sciences et les mathématiques sans que des jeux de compensations viennent altérer l’acquisition de ces fondamentaux. On ne saurait enseigner aux plus jeunes sans maîtriser l’un et l’autre si l’on veut que la France retrouve le rang qui doit être le sien en matière scientifique. C’est aussi dès l’école que tout se joue en matière d’égalité des chances mais aussi, nous le savons d’égalité des genres.

    D’autres démontreront mieux que moi, au cours de ces Assises, le rôle pivot des mathématiques au cœur des transitions actuelles et à venir et c’est là un enjeu majeur pour l’Université, qui adosse ses formations à la recherche afin de mieux relever les défis qui s’annoncent. Qu’il s’agisse de l’intelligence artificielle pour laquelle un plan ambitieux est mis en œuvre au niveau national, qu’il s’agisse des besoins de modélisation ou de traitement des données en matière de santé ou de changement climatique, que l’on analyse les comportements ou l’aménagement du territoire et de l’espace, c’est par les mathématiques que la résolution des problèmes complexes, que la prédiction et donc la prise de décision politique éclairée se feront. Par les mathématiques, c’est donc plus largement la relation entre science et société qui peut être appréhendée

     

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